BOOK REVIEWS

Pierre Gentelle : Chine et « diaspora »

by  Gilles Guiheux /

Pierre Gentelle publie cet ouvrage pour un public d’étudiants candidats aux concours des CAPES et agrégation d’histoire et géographie. Il s’agit donc d’un manuel qui entend présenter de manière synthétique et pédagogique certains acquis récents de la discipline.

On ne se fiera pas au titre qui reprend l’intitulé du programme du concours et qui ne correspond pas au contenu de l’ouvrage. La diaspora chinoise n’est que brièvement abordée (pp. 82-88) et essentiellement sous deux angles : la question de sa définition et ses relations avec la Chine continentale. L’auteur a choisi de s’intéresser non pas à la géopolitique externe de la Chine, mais à sa géopolitique interne. On s’étonnera néanmoins de son insistance (à deux reprises, p. 81 et p. 88) à souligner que Taiwan, « c’est la Chine ». De quelle Chine parle-t-on ? Ce qui paraît une évidence au géographe pose question tant aux politistes qu’aux acteurs politiques locaux ; l’auteur aurait pu évoquer plus longuement qu’il ne le fait en conclusion (p. 169) les modalités problématiques de la construction de la nation chinoise.

Le titre de l’ouvrage devrait plutôt être « géographie régionale de la Chine » ou « Chine et régions », intitulé de l’avant-propos. L’intention de Pierre Gentelle est de rassembler des études de cas. Considérant qu’il existe pléthore d’études sur la Chine dans son ensemble, l’auteur propose « quelques exemples précis d’organisation du territoire » à partir d’une documentation particulièrement riche : images satellites, documents cartographiques, figures et schémas synthétiques.

Trois chapitres traitent de la Chine dans sa globalité. L’un est un chapitre classique de géographie physique relatif à l’espace naturel. L’autre est consacré à l’organisation régionale dans le long terme de l’histoire chinoise. On apprécie ici le talent de l’auteur à concevoir des schémas qui rassemblent une riche information ; ceux-ci constituent des raccourcis efficaces qui devraient être des plus utiles aux lecteurs. Le chapitre conclusif de l’ouvrage présente plusieurs modèles synthétiques de représentation de la géographie de la Chine. Leur intérêt est de faire de la Chine un cas d’application d’une question géographique plus générale : comment construire des régions et découper un territoire ? Il est dommage que Gentelle n’ait pas pu reconstituer davantage l’argumentation des auteurs cités dans l’élaboration de ces modèles (sans doute une contrainte d’édition).

Le cœur de l’ouvrage est constitué d’études de cas, qui n’ont pas d’ambition monographique — il ne s’agit pas de tout dire sur telle ou telle région — mais qui sont l’occasion de présenter un problème ou un thème sous un angle géographique. Les caractéristiques naturelles du territoire chinois et l’histoire de sa mise en valeur agricole (et notamment l’histoire de la gestion des ressources hydrauliques) sont étudiées dans les cas du bassin de la Fen (Shanxi), du lac Dongting (Hunan) et de la haute vallée du Yangzijiang (le barrage des Trois Gorges). La question de l’organisation du territoire et de la distribution de la population est abordée à propos des trois provinces du Hunan, du Hubei et du Guizhou. Shanghai et son delta illustrent la question du développement urbain et du rapport entre espaces urbain et rural.

On apprécie le souci constant de l’auteur de replacer les faits (les inondations de l’été 1998 ou le rôle des axes de transport dans le développement) dans une perspective historique, de même que l’accent mis sur l’économie. Ainsi, cet ouvrage possède des qualités qui en font un manuel utile pour les étudiants comme pour les enseignants.