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Les offres de formation du système scolaire chinois

Le développement national par la science et l'éducation » (ke jiao xing guo), depuis 1995, le gouvernement chinois proclame inlassablement sa détermination sur cette stratégie(1). Comment se traduit-elle dans le domaine de l'enseignement ? On se limitera ici à donner un aperçu des types de formation proposés à la population chinoise dans les établissements scolaires qui entrent, à un degré ou un autre, dans la compétence administrative du ministère de l'Éducation et des services locaux de l'éducation. On a laissé de côté des apprentissages et enseignements organisés de façon autonome par certaines entreprises ou services, généralement pour leur propre personnel. Mais on prendra en compte, à côté du cursus scolaire régulier, une grande variété d'enseignements qui intéressent aussi bien la formation initiale que la formation continue, selon des modalités très diverses, que ce soit la scolarité à plein temps, à temps partiel, en alternance, la pédagogie classique, l'enseignement à distance, ou d'autres formes encore, quand elles relèvent d'établissements dont la fonction principale est l'enseignement.

Depuis vingt ans, la politique de l'enseignement en Chine oscille entre plusieurs priorités, que l'on peut ramener à trois grandes catégories : priorité à l'enseignement universel fondamental, priorité à l'enseignement secondaire, ou priorité à l'enseignement supérieur.

Le premier type de priorité vise le phénomène général du sous-développement. En effet, la priorité donnée à l'enseignement universel fondamental consiste à assurer d'abord ce que les Chinois appellent « les deux bases ». Il s'agit d'une part de généraliser pour les enfants d'âge scolaire une scolarité obligatoire de 9 ans, comprenant en principe un cursus primaire de 6 ans et un premier cycle du secondaire de 3 ans ; d'autre part, et c'est la seconde « base », d'éliminer l'illettrisme parmi la population de 15 à 50 ans.

La deuxième catégorie de priorité vise surtout le problème du chômage. Elle s'attache à restructurer l'enseignement secondaire, notamment dans son second cycle, en sorte d'y donner la prééminence à l'enseignement professionnel et de drainer vers cette branche la majorité des élèves. La réorientation de l'enseignement secondaire est complétée par le développement d'une large gamme d'enseignements complémentaires, par correspondance, télévisés, en stages courts, destinés à donner une qualification professionnelle à des personnels n'ayant pas suivi le deuxième cycle du secondaire, qu'ils soient employés ou chômeurs.

Enfin, la troisième catégorie de priorité prend en compte le rôle déterminant de l'avance scientifique et technologique dans la compétition internationale. Elle préconise l'extension et la rénovation de l'enseignement supérieur.

Des variantes peuvent ajouter à une priorité fondamentale un ou plusieurs éléments empruntés aux autres catégories.

Le choix entre les différentes priorités ne s'exerce pas seulement au niveau national, mais également aux divers échelons administratifs. Il en résulte un tableau très contrasté. En effet, il peut se trouver que dans une même province, l'affectation des ressources nationales soit dictée par la priorité à l'enseignement de base, tandis que celle des ressources locales privilégie les universités.

Pourquoi les administrations doivent-elles opter pour une priorité relativement circonscrite? Cette nécessité résulte en fait d'un choix budgétaire fondamental qui a maintenu le taux de croissance de l'investissement éducatif d'État (national et local) au-dessous du taux de croissance du PIB et du budget. En Chine, les dépenses pour l'éducation représentent seulement 2,4% du PIB, pourcentage inférieur à celui de pays tels que l'Inde ou la Corée. Le pourcentage a baissé par rapport à 1989 où il atteignait 3,1%, alors qu'on avait promis qu'il atteindrait 4% en 2000(2). Pour augmenter les ressources, l'État recourt de plus en plus aux contributions des familles et même au financement entièrement privé des établissements. En 1997, les familles et les fonds privés assumaient déjà 35% des dépenses éducatives(3). Cette part s'accroît continûment ; mais par là se creuse aussi, en fonction du revenu familial, l'inégalité sociale dans l'accès aux différents degrés et types d'enseignement.

L'adoption par le gouvernement ou les administrations chinoises de telle ou telle priorité éducative s'est volontiers abritée derrière les recommandations émises par les experts internationaux, ceux de la Banque mondiale en particulier. Mais ces avis avaient été souvent inspirés par les Chinois eux-mêmes, à leurs propres fins. En effet, l'information sur laquelle reposait l'avis de ces experts provenait essentiellement des autorités chinoises ; les services ont généralement présenté les données au mieux des finalités politiques ou autres favorisées par leur direction respective. Dans certaines régions, les bureaux de l'Éducation, soucieux d'évincer la tutelle exercée par les ministères techniques sur l'enseignement secondaire technique, et de s'approprier ses moyens, ont eu à cœur de démontrer, chiffres en main, que les diplômés des écoles ordinaires éprouvaient plutôt moins de difficulté à trouver un emploi que leurs camarades des établissements techniques. Ces bureaux ont pu ainsi détourner vers les écoles de leur ressort l'aide prévue pour la formation professionnelle, au nom de la vertu pédagogique des acquis généraux, opposée aux aléas de la spécialisation précoce. Ailleurs, la déperdition des effectifs au long du primaire et du secondaire était sous-estimée, alors qu'étaient mis en évidence le goulot d'étranglement à l'entrée de l'université ainsi que le déficit d'ingénieurs et de cadres d'entreprise de niveau supérieur, en sorte d'obtenir les investissements universitaires jugés immédiatement rentables pour l'économie locale.

L'effort, malgré tout très considérable, surtout en termes de travail des enseignants et gestionnaires, qui a été consenti depuis vingt ans pour rénover et développer l'enseignement à tous les niveaux aboutit aujourd'hui à une offre de formation nettement plus diversifiée, ouverte à une population beaucoup plus nombreuse que précédemment.

Pour plus de clarté, nous examinerons cette offre par niveaux plutôt que par branches, en essayant d'évaluer les flux d'élèves et la qualité des formations. Les chiffres donnés ne peuvent prétendre à une exactitude rigoureuse, car les statistiques disponibles manquent de cohérence et se contredisent souvent. On pourra du moins préciser au passage les fonctions des différentes écoles techniques, dont les dénominations sont loin d'être unifiées dans l'usage non plus que dans les statistiques, ce qui contribue passablement à la confusion des données globales.

La formation générale de base

Le système scolaire offre d'abord une formation générale de base qui relève de la scolarité obligatoire. Cette scolarité obligatoire comporte en principe neuf années d'études. Elle est payante pour la plupart des enfants. Son coût varie entre plusieurs milliers et une dizaine de yuan par an ; dans une école très ordinaire en ville, il s'élève autour de 75 yuan par mois.

Le programme comprend lecture, écriture, calcul, connaissances scientifiques, histoire-géographie, morale, éducation physique, musique et dessin. L'enseignement d'une langue étrangère existe dès le primaire dans quelques établissements des grandes métropoles. Il est répandu à partir du premier cycle du secondaire dans une partie des écoles urbaines de régions prospères. Il en va de même de l'usage des ordinateurs. En zone rurale, parfois aussi en ville, certaines écoles pratiquent une initiation aux techniques agricoles ou industrielles dans le premier cycle du secondaire. On souhaite renforcer cette formation, dite « professionnelle » (zhiye) dans les écoles rurales et se servir des établissements comme centres de diffusion des applications techniques(4).

Depuis 1997, le taux de scolarisation dans le primaire atteint officiellement 98,9% ; il se serait élevé à 99,09% à la rentrée 1999(5). Chaque année il y aurait donc environ 190 000 enfants qui ne commencent pas l'école. Le taux d'abandons scolaires au cours du primaire était en 1999 de 0,9% des effectifs(6). On compte ainsi un accroissement annuel d'au moins 1 500 000 nouveaux illettrés.

A la rentrée 1999, 88,6% des diplômés du primaire sont entrés dans le premier cycle du secondaire(7). En 1999, le taux de scolarisation au niveau de ce cycle a atteint 87,3%(8). Le taux d'abandons au cours de ce cycle reste en progression, s'élevant à 3,28% en 1999(9). On peut donc estimer que, depuis deux ou trois ans, 80% des classes d'âge atteignant leur quinzième année possèdent le bagage d'une scolarité obligatoire complète. Toutefois en zone rurale et dans les régions pauvres, il s'agit souvent de huit années d'école au lieu des neuf ans réglementaires.

D'autre part, les progrès effectués sont loin d'être consolidés. En effet, il est fort probable que les statistiques scolaires officielles, fondées sur le comptage de la population légalement enregistrée localement, omettent dans le calcul des taux de scolarisation les enfants sans statut local - naissances non déclarées, notamment celles de filles, pour échapper à l'obligation de l'enfant unique, ou enfants de travailleurs migrants. Le taux officiel assez bas d'enfants qui n'entrent pas dans le système scolaire ou le quittent précocement dissimule des variations de très forte amplitude, et même un recul de la scolarisation, affectant certaines régions ou groupes de population.

D'après les statistiques, la différence entre scolarisation des filles et des garçons s'est affaiblie et tend à se résorber (99,1% pour les garçons, 99% pour les filles à l'entrée dans le primaire) ; le pourcentage de filles qui accomplissent cinq années de primaire (92,62%) est même un peu supérieur à la moyenne générale (92,48%)(10). L'avance est peut-être moins spectaculaire dans la réalité, mais la tendance est là, indéniablement.

Plus préoccupante, aux yeux des autorités, est la situation de 190 sous-préfectures (xian), soit 6,6% des circonscriptions de cet échelon, où vivent plus de 22 millions d'habitants. Le taux d'entrée dans le primaire y est inférieur à 70%, voisin même de 50% dans des sous-préfectures tibétaines, tandis que le taux d'abandons au cours du primaire dépasse 10%, voire 18%, en région tibétaine encore(11). Ces sous-préfectures sont situées dans les zones montagneuses, dans celles où l'activité pastorale reste importante, le plus souvent dans les marches frontières et les régions peuplées de minorités nationales. Dans l'ensemble, les taux de scolarisation parmi les populations des minorités nationales restent inférieurs à ceux de la population han.

Un recul de la scolarisation affecte certains groupes de population rurale, lorsque les familles rejoignent les hommes venus travailler en ville ou que les jeunes migrants fondent une famille en ville. Qu'ils bénéficient ou non d'un permis de résidence provisoire, il est fréquent que les écoles locales refusent d'accepter leurs enfants, ou bien ne les acceptent qu'au prix fort, obligeant les parents à retirer les enfants dès que survient une période de chômage. Dans la banlieue des grandes villes, des solutions de fortune se mettent parfois en place : les familles se cotisent pour louer les services d'un instituteur, voire pour ouvrir une école. On n'a actuellement aucun moyen de chiffrer le nombre de ces enfants ainsi privés de scolarité, ou réduits à une scolarité précaire. D'après le témoignage d'éducateurs à Shanghai et Pékin, il faut sans doute compter plusieurs millions d'enfants dans cette situation en région urbaine. Phénomène urbain également, les licenciements et le chômage qui frappent en permanence 17 à 23 millions de travailleurs résidents des villes(12) provoquent des ruptures de scolarité ou l'impossibilité de mettre les enfants à l'école lorsque les parents n'ont plus les ressources suffisantes. Le déficit de scolarisation qu'entraîne cette situation semble cependant moins important que dans le cas des enfants de travailleurs migrants. Du fait qu'il s'agit de résidents, les autorités locales assurent en général une aide pour la scolarité primaire au moins. Le coût social est surtout celui d'une sortie trop précoce du système scolaire, sans aucune qualification.

Le taux général d'illettrisme parmi la population au-dessus de 15 ans était de 14,5% en 1998(13) ; dans la tranche d'âge de 15 à 50 ans, il a été abaissé à 5% en 1999, mais le niveau d'instruction de ces générations reste encore fort inégal(14). Par ailleurs, la capacité du dispositif de lutte contre l'illettrisme, dont le progrès avait permis, au début des années 1990, de commencer à réduire le stock permanent d'analphabètes, est désormais insuffisante au regard du chiffre annuel des nouveaux analphabètes. En 1998, 3,2 millions d'adultes avaient été sortis de l'illettrisme, mais la même année on comptait au moins 6,5 millions de nouveaux illettrés de 15 ans, soit un accroissement net de 3 millions par an(15). Tous les indicateurs laissent penser que depuis lors cette progression de l'illettrisme persiste, à un taux qui augmente même, et qu'elle concerne les villes autant que les campagnes.

La qualité générale de l'enseignement de base s'est beaucoup améliorée grâce à un immense travail méthodique et permanent de formation et recyclage du corps enseignant. Aujourd'hui, 95,9% des instituteurs et 85,5% des enseignants du premier cycle du secondaire atteignent les normes réglementaires(16). La situation demeure cependant fragile car l'effet de la démographie va, d'ici 2002, augmenter d'un tiers les effectifs du premier cycle du secondaire. La population scolarisable qui était, pour ce niveau, de 61 millions en 1998 atteindra 79 millions en 2002.

L'offre de formation au niveau du secondaire

Au niveau du premier cycle du secondaire on trouve en Chine une situation tout à fait comparable à celle qui prévalait en France avant la réforme Carcopino de 1941, quand coexistaient des écoles primaires supérieures, des écoles techniques et les classes de premier cycle des lycées.

Comme nos écoles primaires supérieures d'antan, en zone rurale et dans certains quartiers urbains, une partie des écoles secondaires chinoises de premier cycle proposent quelques cours techniques pour préparer une insertion professionnelle. Elles peuvent alors être désignées comme « écoles professionnelles » (zhiye xuexiao). Les autres s'en tiennent à un enseignement général dont l'objectif est soit le perfectionnement des acquis antérieurs de base, soit la préparation au passage dans le cycle supérieur.

A côté de ces écoles ordinaires et professionnelles existent des écoles techniques (jigong xuexiao et jishu xuexiao) — correspondant tantôt au premier, tantôt au second cycle du secondaire, ou à un niveau intermédiaire —, dans lesquelles on dispense à la fois un enseignement théorique et une formation pratique en atelier. En 1998, ces écoles techniques dépendaient pour un quart d'entre elles des ministères techniques et, pour le reste, des provinces et municipalités. Leur nombre et leurs effectifs ont eu tendance à diminuer depuis huit ans. Elles comptent actuellement 1 813 000 élèves, dont un cinquième ne suivent qu'une scolarité de deux ans(17).

Le déclin de ces écoles techniques de premier cycle est inégal selon les spécialités et les régions. Il semble en général plus accentué dans les provinces les plus développées, et y touche davantage les spécialités industrielles que celles liées à l'agriculture(18). Le recul s'explique par le coût de gestion de cet enseignement, par ses résultats décevants du point de vue de la qualification qu'il peut offrir au regard des besoins actuels sur le marché du travail, et du même coup par une demande décroissante des familles, qui préfèrent pour leurs enfants une formation moins onéreuse et plus ouverte sur des possibilités de promotion future.

Il est vraisemblable que sous le simple effet de l'afflux démographique qui va augmenter d'ici deux ans de 18 millions les effectifs du premier cycle du secondaire(19), dans cette section du cursus scolaire, la formation générale continuera à l'emporter massivement contre l'offre de formation professionnelle.

La difficulté sera surtout d'assurer la qualité de cette formation générale et de l'améliorer. A cet égard, depuis huit ans déjà, le corps enseignant est appelé à concentrer son attention sur le développement équilibré des capacités des élèves plutôt que sur la transmission de connaissances livresques pour réussir aux examens. « Apprendre à apprendre » remplit les colonnes des revues spécialisées(20). Mais avec des classes de 45 à 60 élèves et des professeurs dont les salaires sont, en bien des endroits encore, versés très irrégulièrement, la révolution pédagogique est nécessairement lente, même si à Shanghai et au Jiangsu elle est déjà une réalité spectaculaire.

Pourtant, le maillon le plus faible du système scolaire se situe sans doute à l'échelon suivant, au niveau du deuxième cycle du secondaire. A cette étape, deux voies sont ouvertes : d'une part le lycée général (putong gaoji zhongxue), qui débouche sur le concours d'entrée à l'Université ; d'autre part le lycée professionnel (zhongdeng zhiye xuexiao) ou spécialisé (zhongdeng zhuanye xuexiao), ce dernier englobant les écoles normales secondaires et des lycées techniques.

En 1998, sur 16 millions de diplômés du premier cycle, la moitié continuaient des études dans le cycle supérieur. Sur ces 8 millions d'élèves, la moitié entraient dans les lycées professionnels et techniques(21). Cette proportion reste inférieure aux objectifs fixés depuis quinze ans, qui sont d'orienter 60 à 70% du flux vers l'enseignement professionnel et technique(22). Le taux actuel de 50% est d'ailleurs en partie illusoire. En 1998, 20% seulement des élèves entraient dans les lycées spécialisés, c'est-à-dire les vrais établissements de formation technique, dotés des équipements et de l'encadrement nécessaires. 30% étaient accueillis dans des établissements dits « professionnels » de qualité beaucoup plus aléatoire, certains gérés de façon très efficace et innovante, avec le soutien d'entreprises locales, d'autres assez formels et sans grands moyens(23). Des enquêtes montrent que dans la moitié de ces écoles « professionnelles » plus des deux tiers des diplômés ne trouvent pas d'emploi à la sortie(24). Il n'est donc pas surprenant qu'en 1999 les effectifs recrutés par les lycées professionnels et spécialisés aient chuté de 400 000, et qu'en zone rurale moins de 60% des élèves aient sollicité l'entrée dans ces établissements. On s'attend en outre à ce que la baisse s'accentue à la rentrée 2000(25).

La première raison des réticences envers les lycées professionnels et techniques est le coût élevé des frais de scolarité comparés à ceux du lycée général. Il s'y ajoute que cette filière n'autorise pas à poursuivre des études supérieures dans un cursus ordinaire (benke) et interdit donc l'accès aux universités les plus réputées. Elle permet seulement de concourir pour entrer dans certains cursus spécialisés (zhuanke), offerts la plupart du temps dans une école supérieure spécialisée (gaodeng zhuanye xuexiao), dont le diplôme ouvre des possibilités d'emploi et une échelle de salaire plus limitées.

A l'heure actuelle, un pourcentage minime des diplômés des lycées professionnels et techniques parviennent à poursuivre des études dans l'enseignement supérieur. En 1999, en dépit de toutes les circulaires enjoignant de faciliter ce passage, on observait que dans la province d'Anhui, 2,5% seulement des 67 610 diplômés de l'enseignement professionnel et technique étaient admis dans l'enseignement supérieur(26). En outre, l'emploi des diplômés du technique qui arrêtent leurs études à la fin du secondaire ne se présente pas dans des conditions sensiblement meilleures que celui de leurs camarades des lycées généraux dans le même cas(27).

Les formations proposées par les lycées techniques (zhongdeng zhuanye xuexiao) concernent pour environ 1/3 des métiers industriels, pour 12% des métiers liés à l'agriculture et à l'exploitation des forêts, pour 17% les professions de la santé, pour 18% la gestion et la comptabilité, pour 5% les emplois juridiques et administratifs ; le reste intéresse les sports et les métiers artistiques(28). Les écoles techniques (jigong xuexiao) et les écoles professionnelles (zhiye xuexiao) proposent de même des spécialités agricoles, industrielles et une formation aux métiers paramédicaux, mais on y trouve aussi des formations aux emplois du tertiaire, dans le commerce, le tourisme et les services(29). Dans les grandes villes, la qualité de la formation est souvent équivalente dans les trois catégories d'établissement, la différence entre eux est surtout d'ordre administratif : lycées et écoles techniques relevant des services de l'industrie ou de l'agriculture, tandis que les écoles professionnelles relèvent principalement des services de l'enseignement. En revanche, dans les villes moyennes et en zone rurale, le niveau des écoles professionnelles est couramment très inférieur à celui des deux autres catégories.

La qualité de l'enseignement secondaire général du second cycle a fait des progrès considérables depuis quinze ans. La municipalité de Shanghai, qui est à la pointe dans ce domaine comme en beaucoup d'autres, a mis en œuvre une rénovation des programmes, de la pédagogie et des équipements qui place aujourd'hui ses lycées parmi les meilleurs du monde. Mais de grands écarts subsistent, dont un chiffre suffira à donner l'idée : dans les lycées d'enseignement général des grandes villes, le taux moyen de réussite des diplômés candidats au concours d'entrée à l'Université est de 60%, dans ceux des chefs-lieux de sous-préfecture et au-dessous, il est de 30% seulement(30).

Pour surmonter les préventions et dysfonctionnements causés par la division du deuxième cycle du secondaire en deux filières, et l'orientation contraignante qui lui est attachée, le rapport de la Banque mondiale de 1998 a recommandé au gouvernement chinois l'abolition pure et simple de cette distinction. Il préconisait un système unique d'enseignement général, prévoyant seulement une plus grande souplesse des programmes avec un large jeu d'options intégrant des initiations professionnelles.

Cette proposition a été récusée par les autorités chinoises et, dans une large mesure, par l'opinion des milieux enseignants. On l'estime parfaitement inadaptée à la situation présente en Chine, car elle aboutirait à réduire le nombre de diplômés du premier cycle qui continuent des études, alors qu'aujourd'hui cette part, encore trop faible, de 50% n'est possible que parce que la moitié des élèves sont accueillis dans la filière professionnelle. La suppression des écoles professionnelles tarirait aussi la formation de techniciens de niveau élémentaire, absolument indispensables dans la phase actuelle de développement, en particulier pour accroître les performances agricoles. Enfin, l'augmentation du nombre des lycées généraux n'accroîtrait pas les chances des jeunes des zones rurales d'accéder à l'enseignement supérieur, ainsi que le prouve l'écart actuel entre le taux de réussite dans les grandes villes et ailleurs(31).

L'enseignement secondaire professionnel et technique s'est finalement vu accorder le troisième rang seulement parmi les priorités décidées en 1999, mais une série de mesures importantes sont mises en œuvre pour remédier à ses déficiences.

Après la promulgation d'une loi cadre sur l'enseignement professionnel, les mesures ont consisté d'abord à transférer aux gouvernements locaux des pouvoirs de décision aussi bien que la responsabilité financière dans la gestion des écoles techniques, en sorte que la formation, le recrutement et les débouchés professionnels y soient réellement intégrés à la politique de développement local. Le transfert est assorti d'un arsenal de dispositions juridiques sur l'usage des biens et le statut des personnels scolaires. A la suite des dernières circulaires publiées en février 2000, à peine une centaine d'établissements secondaires techniques, sur près de 20 000, restera soumise à une tutelle de l'administration centrale : il s'agit de lycées techniques pour les chemins de fer, l'industrie pétrolière ou certaines forces de police(32).

Un mouvement se dessine pour mettre en œuvre une formation spécifique des enseignants destinés au secteur professionnel, pour établir et multiplier les passerelles entre la filière professionnelle et technique du secondaire et l'enseignement supérieur. Mais, comme le soulignent les responsables de l'éducation au plus haut niveau, l'application généralisée et le succès de telles initiatives dépendent de l'instauration d'un système spécifique d'inspection et d'évaluation permanente qui est entièrement à construire pour ce secteur de formation(33).

L'enseignement secondaire pour adultes

Au niveau du secondaire, une partie de l'offre de formation est constituée par l'enseignement pour adultes. Les statistiques donnent l'impression d'un développement spectaculaire. En 1998, l'effectif des entrants s'élevait à 77 millions d'élèves, près du triple de l'enseignement scolaire régulier(34). Mais en regardant le détail des statistiques, on s'aperçoit que près de 75 millions des élèves sont engagés dans des formations très courtes, d'environ un an, généralement à temps partiel ou concentrées sur quelques mois. Il s'agit de stages techniques (jishu peixun) qui concernent, pour 70 millions, une population paysanne, et pour 5 millions, des employés et ouvriers. Les documents et rapports indiquent que les stagiaires sont en grande majorité des jeunes entre 15 et 25 ans, souvent pris immédiatement après le diplôme du premier cycle du secondaire, en complément de formation, à défaut d'une admission dans une école de second cycle.

Le rattrapage d'une scolarité secondaire ordinaire ne concerne qu'un effectif d'environ 700 000 personnes ; il est partagé à peu près à égalité entre urbains et ruraux.

Restent un peu plus d'un millions d'adultes engagés dans des formations dites « spécialisées » (zhuanye) de trois ans, correspondant au second cycle du secondaire. Cet enseignement est, pour un tiers des élèves, dispensé à distance par radio, télévision, correspondance, depuis peu même par l'Internet, tandis que dans la majorité des cas il est assuré à temps partiel par certaines écoles ordinaires ou des établissements spéciaux. Cette dernière pratique est en vigueur pour le recyclage des instituteurs qui représente 1/10 des adultes en formation « spécialisée ». Pour le reste, les spécialités et les niveaux de qualification proposés correspondent à peu près à l'offre de formation des lycées spécialisés.

Les chiffres montrent qu'en ce secteur on est loin d'avoir atteint les objectifs fixés. En effet, une circulaire de la Commission d'éducation d'avril 1994 prévoyait 6 millions d'élèves dans les écoles secondaires « spécialisées » pour adultes en l'an 2000(35). La cible devait correspondre au nombre annuel des jeunes qui n'étaient pas accueillis dans le second cycle de l'enseignement régulier. En fait, le recrutement du secondaire « spécialisé » pour adultes est resté stable. La stagnation semble s'expliquer par les mêmes facteurs que celle des lycées spécialisés : coût de fonctionnement, manque de personnel. La raison profonde est surtout que dans les priorités générales l'enseignement secondaire n'a pas reçu jusqu'ici la première place, et que, dans l'enseignement secondaire pour adultes, on a concentré les moyens sur les formations courtes donnant une qualification professionnelle élémentaire et relativement ciblée à de larges contingents de main d'œuvre au chômage ou en emploi précaire. L'urgence du problème social l'a emporté sur l'action à long terme. Il ne semble pas que cette orientation doive être sensiblement modifiée dans un avenir très proche(36).

L'offre de formation au niveau de l'enseignement supérieur

En effet, c'est clairement l'enseignement supérieur qui reste, après l'enseignement de base, la seconde priorité de la politique de l'enseignement à tous les niveaux de l'administration, et qui tend souvent même à l'emporter dans les préoccupations des pouvoirs publics, approuvés sur ce terrain par l'opinion d'un grand nombre de familles aisées et modestes.

Deux types de cursus

L'enseignement supérieur régulier offre deux types de cursus : un cursus dit « principal » (benke) qui dure généralement 4 ans (six ou sept ans en médecine, cinq ans en physique), et un cursus court, dit « spécial » (zhuanke), de deux ou trois ans seulement. Cette distinction ne dépend pas des disciplines. On trouve en droit, en économie, en littérature, comme en comptabilité, en médecine, en génie électrique ou en sciences, aussi bien des cursus principaux que des cursus spéciaux. Elle ne correspond pas entièrement à une différence de catégories entre les établissements. Il est vrai que les universités les plus prestigieuses, comme l'Université de Pékin ou Qinghua, n'offrent que des cursus principaux, tandis que la plupart des « instituts » (xueyuan), des écoles supérieures spéciales (gaodeng zhuanke xuexiao) et même de nombreuses « universités » (daxue) comportent exclusivement des cursus courts. Toutefois, un nombre croissant d'établissements de toutes dénominations proposent les deux types de cursus. La différence réside surtout dans le fait que le cursus spécial, en principe tourné vers les applications pratiques d'une discipline, inclut moins d'apprentissages généraux et de connaissances fondamentales ; il donne une formation plus étroite et ciblée. Le diplôme qu'il délivre n'autorise pas généralement à continuer par une formation à la recherche en maîtrise, puis éventuellement en doctorat, ni à postuler une bourse officielle d'études à l'étranger.

Sélection et répartition des étudiants

Le recrutement dans l'enseignement supérieur régulier s'effectue par un concours national, dont les modalités sont en constante évolution. La dernière formule, expérimentée en 1999 au Guangdong, en 2000 dans quatre autres provinces, qui sera étendue cette année à 10 provinces y compris Pékin, et sera généralisée en 2002, impose trois épreuves communes en chinois, mathématiques et langue étrangère, et une ou deux épreuves à option, selon l'université et la discipline ambitionnées par le candidat(37).

Le nombre de places offertes au concours est en augmentation sensible. En 1998, il était de 1 083 600, en 1999 il atteignait 1 600 000, en 2000 il doit passer à 1 800 000(38). Le chiffre actuel représente 10 % de la classe d'âge et environ 40% de la promotion des diplômés des lycées généraux et professionnels(39). En 2010, le ministère compte que 15% de la classe d'âge entrera dans l'enseignement supérieur. Il faut rappeler qu'en 1994 on en était à 2,4% seulement, comme en 1960. Contre la pression d'une partie de l'opinion, les autorités refusent actuellement l'idée d'une ouverture massive et trop accélérée, en faisant valoir qu'elle causerait plus de problèmes sociaux et de frustrations qu'elle n'en guérirait(40).

En 1998, les deux tiers des étudiants en cours d'études suivaient un cursus long, un tiers un cursus court. Mais depuis lors, la proportion des étudiants en cursus court a augmenté. C'est en effet par l'accroissement des places dans ces formations qu'on a réussi à ouvrir plus largement l'accès à l'enseignement supérieur. Pour offrir notamment aux diplômés des écoles secondaires professionnelles la possibilité d'une formation supérieure, les gouvernements provinciaux et divers organismes ont créé des instituts professionnels techniques (zhiye jishu xueyuan), parfois annexés à un établissement supérieur ou secondaire existant, parfois indépendants. La création d'institutions privées de ce genre est activement encouragée : il en existe plusieurs à Shanghai. Les modalités peuvent être très variées, mais le ministère de l'Éducation a réaffirmé récemment son droit de regard sur les garanties pédagogiques(41).

Ces établissements proposent une formation en deux ans qui rappelle celle de nos IUT. Leur fonctionnement est envisagé sur le mode des community colleges américains, insérés dans le tissu local et servant au premier chef ses besoins. A la fin de 1998, il existait 432 instituts de cursus court et de formation professionnelle technique sur un total de 1022 établissements d'enseignement supérieur régulier.

Les programmes

Depuis quinze ans un bouleversement complet a été introduit dans le système universitaire. La loi de l'enseignement supérieur du 29 août 1998 a formalisé le changement, ainsi que de nombreux textes législatifs parus depuis. Les universités ont obtenu une assez large autonomie. Il en résulte qu'elles décident du recrutement de leurs étudiants en fonction de leurs objectifs et moyens, et les répartissent à leur convenance entre leurs départements et sections.

En réalité, les universités sont soumises à un classement hiérarchique qui les autorise à choisir leurs recrues dans une tranche plus ou moins élevée des notes obtenues au concours d'entrée. Par ce système, les instituts professionnels techniques et les écoles supérieures spéciales ont recruté jusqu'ici surtout des diplômés des lycées généraux, dont le programme prépare directement au concours, au détriment des diplômés des lycées spécialisés et des écoles secondaires professionnelles, auxquels on voudrait maintenant offrir ce débouché.

L'autonomie pédagogique a permis de développer des spécialités et des programmes nouveaux, d'instituer, notamment en science, un enseignement fondamental pluridisciplinaire permettant ensuite plus de solidité et de créativité dans la spécialisation. Mais la procédure d'homologation d'un nouveau cursus reste lourde, elle doit nécessairement recevoir l'aval du ministère de l'Éducation. Celui-ci envisage de réduire de moitié le nombre des spécialités (zhuanye) reconnues, aujourd'hui de 200, et de donner à chacune une acception plus large, susceptible d'interprétations plus souples(42). Un répertoire national de la répartition géographique des spécialités est aussi en cours d'élaboration pour permettre une meilleure évaluation. On doit souligner par ailleurs que la mise en œuvre de la nouvelle politique de gestion du personnel universitaire qu'exige la rénovation pédagogique a posé et continue à poser de nombreux problèmes matériels et humains.

L'idée de la réforme était qu'en concertation avec les autorités locales auxquelles est dévolu désormais l'essentiel de la charge financière et du contrôle administratif, les universités, pour attirer les meilleurs étudiants, augmenteraient les spécialités nouvelles et « rentables ». Mais l'ajustement est loin de s'effectuer aisément et rationnellement. Beaucoup d'établissements proposent des cours au rabais sous des noms alléchants. On court après le profit immédiat. Les étudiants les plus brillants en mathématiques désertent la science et les techniques pour les spécialités plus lucratives de la finance ou du commerce international. La disparité entre les établissements et les formations tend à s'accuser plutôt qu'à se résorber. La suppression générale de la gratuité des études supérieures depuis 1996 paraît y contribuer activement.

Il existe une centaine de très bonnes universités, qui appartiennent à ce qu'on appelle le « programme 211 »(43). Elles reçoivent du gouvernement central et des gouvernements locaux des crédits importants. Elles cultivent la science de pointe et sont chargées de former l'élite. Mais même dans ces établissements, tous les départements n'atteignent pas un niveau comparable. Les 900 autres établissements d'enseignement supérieur régulier présentent une situation contrastée, où le solide côtoie le médiocre.

La répartition des étudiants entre les spécialités offertes montre, d'après les chiffres de fin 1998 (ceux de l'année universitaire en cours ne sont pas encore parus), que 41% suivent des études d'ingénieur, 16% des études d'économie, 12% des études de science, 4,8% des études de droit, 5% se préparent à l'enseignement, 7,5% des études médicales, 16% des études de littérature, 3,8% des études d'agronomie : toutes ces spécialités sont en progression à peu près équivalente. Seules la philosophie, 0,1%, et l'histoire, 1,6% sont en déclin.

Il est difficile d'estimer l'incidence du coût des études sur le choix des étudiants. Les frais de scolarité s'élèvent en principe à 1 000 à 2 600 yuan en lettres et en sciences. Le coût est double dans les formations professionnelles, et les autorités y voient une des raisons pour lesquelles cette voie reste interdite aux diplômés des lycées professionnels des régions rurales(44).

Formation à la recherche

Au-delà du cursus principal, les étudiants peuvent continuer une maîtrise (shuoshi), obtenue en deux ou trois ans après soutenance d'un mémoire de recherche, puis d'un doctorat (boshi), obtenu en trois à quatre ans après soutenance d'une thèse. Ces programmes existent, pour certaines matières seulement, dans 405 établissements universitaires et 328 organismes de recherche. L'autorisation de créer un programme doctoral est soumise à un contrôle rigoureux du ministère. Les étudiants bénéficient d'un tutorat rapproché. Les résultats n'en demeurent pas moins inégaux, comme dans d'autres pays. Les candidats sont recrutés par examen. 72 500 ont été admis en maîtrise en 1998, un effectif un peu inférieur en 1999 ; on prévoit un recrutement de 120 000 à la rentrée 2000(45). Le nombre des docteurs est de 9 000 par an. Depuis 1985 on a créé des centres d'accueil dotés de laboratoires pour les post-doctorants. Fin 1997, il en existait 450, dans 10 grandes disciplines et 55 spécialités, répartis entre 36 villes et groupant 7 100 docteurs. Le dispositif, destiné à atténuer la fuite des bons cerveaux vers l'étranger s'est constamment renforcé(46).

L'enseignement supérieur pour adultes

Les limites des possibilités d'accueil de l'enseignement supérieur ont entraîné depuis longtemps le développement d'un enseignement pour adultes diversifié et important. La politique actuelle est de continuer à favoriser ce secteur, parallèlement au gonflement de l'Université, et même de l'étendre pour en faire un instrument de formation permanente. A cette fin, la structure de l'enseignement supérieur pour adultes doit être modifiée en vue de privilégier la formation au poste de travail, conduite avec la collaboration de centres universitaires, plutôt que l'expansion d'institutions de type scolaire accueillant des stagiaires.

En 1998, le secteur comptait 962 établissements, dont 45 fonctionnant par radio ou télévision, 4 par correspondance. 567 s'occupaient de la formation d'employés et d'ouvriers, 3 étaient destinés à former des paysans, 153 des cadres de gestion, 190 des enseignants et directeurs d'écoles secondaires. Le recrutement était de 1 001 400 étudiants, dont 113 200 en cursus principal et 888 200 en cursus court.

Comme l'enseignement secondaire pour adultes, l'enseignement supérieur pour adultes ne sert que très marginalement (à hauteur de 10% de ses effectifs) comme substitut d'un cursus régulier. Sa fonction essentielle est de donner un complément de formation dans un domaine précis à des personnes en poste ou en instance de changement d'activité. La durée des études est ordinairement de deux à trois ans, plus rarement de quatre ans, mais il existe aussi des formules plus courtes et concentrées. Les universités se sont très largement investies dans cette tâche, qui constitue pour elles une source importante de revenus. Elles accueillent actuellement plus de la moitié des adultes en formation supérieure et offrent un éventail très étendu de services. En effet, dans la majorité des cas la formation pour adultes fait l'objet d'un contrat avec une entreprise ou une administration, qui envoie ensuite son personnel désigné ou volontaire suivre les cours. Les inscriptions individuelles spontanées sont moins courantes et souvent rendues difficiles du fait qu'il n'existe pas de validation des acquis professionnels. On recensait en 1998 109 000 « autodidactes » reçus à des examens universitaires. Il est arrivé que parmi eux certains soient ultérieurement admis en doctorat.

Les moyens informatiques auxquels les autorités, tout comme la population, se sont résolument converties sont en train d'augmenter et d'améliorer considérablement les possibilités d'action de l'enseignement supérieur pour adultes. Il est vraisemblable que ces possibilités seront exploitées de plus en plus largement pour pallier les insuffisances du dispositif universitaire, aussi bien en direction de la jeunesse des zones rurales que pour la formation générale de personnels techniques dans les provinces les plus démunies de l'Ouest sur lesquelles on porte actuellement les efforts(47).

 

QUEL bilan peut-on dresser des formations actuellement offertes par le système scolaire chinois? Celui d'un progrès général et d'un fort dynamisme, assortis d'une grande disparité géographique, disciplinaire et sociale.

La bataille de la formation de base n'est pas terminée. En bien des régions ses acquis ne tiennent que grâce au poids de l'action de l'État, et surtout de l'État central. Dans les villes où l'on croyait le combat gagné, l'illettrisme de la misère reprend du terrain. Un fort engagement reste nécessaire, qui réduit évidemment les ressources disponibles pour d'autres tâches.

Dans l'enseignement secondaire, la tentation est forte de scolariser à tout prix, le plus longtemps possible, pour masquer ou atténuer la pression du chômage des jeunes. Beaucoup de régions y ont cédé en 1999, à la suite d'une circulaire imprudente du ministère de l'Éducation, et ont accru sans mesure les effectifs des lycées généraux(48). Le fort taux d'échecs et d'abandons scolaires désigne bien le cursus secondaire comme le maillon le plus fragile de l'édifice, le plus vulnérable aussi. Malgré des réalisations locales spectaculaires, il semble que l'amélioration générale de la qualité exigera encore de longues années. L'accès aux meilleures formations est aussi réservé désormais aux enfants des familles capables de le payer.

Si le taux d'échecs et d'abandons peut servir de mesure à l'efficacité, celle de l'enseignement universitaire paraît excellente. En effet, ce taux y est très bas, en raison de la sélection, de l'encadrement vigilant dont jouissent les étudiants, ainsi que du prix des études. Un critère d'évaluation plus pertinent, sans doute, est l'embauche à la sortie de l'université. Depuis une dizaine d'années, les diplômés cherchent eux-mêmes un travail, l'État ne les affecte plus d'office à un emploi à leur sortie de l'enseignement supérieur. Or ils trouvent des emplois, le chômage effectif semble bas, mais un certain nombre se plaint maintenant d'avoir à accepter une déqualification ou un salaire médiocre avec peu de perspectives d'avancement.

La qualité de la formation universitaire laisse souvent à désirer faute de contact suffisant avec la recherche. Il ne s'agit pas tant d'une question de moyens ou d'équipements que d'un problème de conception de l'université comme créatrice de connaissances. Ce n'est pas surprenant si l'on pense que 37,8% des universités chinoises ont moins de 10% de titulaires de la maîtrise parmi leurs enseignants, et 76,12% ont moins de 2% de docteurs parmi leurs professeurs. La hausse récente des salaires universitaires va peut-être attirer à nouveau vers ce métier les bons étudiants, qui depuis vingt ans refusaient, la plupart, de devenir professeurs.

Il s'ajoute une faiblesse technique pour faire valoir les différences de formation sur le marché de l'emploi. En effet, il n'existe pas d'homologation des diplômes. Les diplômes sont bien unifiés dans leur forme, mais il manque un système d'accréditation, de vérification du contenu.

Cependant, l'essor et la compétition au sein du monde universitaire, ainsi que l'attention que lui portent les pouvoirs locaux et la pression d'une demande sociale très forte donnent à croire que dans ce secteur l'évolutin va s'accélérer.