BOOK REVIEWS
Supachai Panitchpakdi et Mark L. Clifford, China and the WTO, Changing China, Changing World Trade
China and the WTO est le fruit d'une collaboration entre Supachai Panitchpakdi, docteur en économie, ancien vice-premier ministre et ministre du commerce thaïlandais, futur successeur de Mike Moore à la tête de l'Organisation mondiale du commerce à compter de septembre 2002, et Mark L. Clifford, journaliste basé de longue date à Hong Kong et actuellement rédacteur en chef pour l'Asie de Business Week.
Cet ouvrage vise avant tout à présenter au grand public, dans un style journalistique et en six grands chapitres, ce que les auteurs estiment être les principaux aspects de la relation Chine-OMC. Ainsi, à leurs yeux, cette accession est d'importance « comparable au premier test nucléaire chinois de 1964 » et permettra, en dépit des quelques défis à relever, de faire de la Chine l'une des deux ou trois économies les plus prospères du milieu du XXIe siècle (« China Rising », pp. 1-32).
On comprend donc assez vite la nature du propos, un satisfecit adressé à l'Organisation pour avoir réussi, au prix de négociations certes longues et ardues, à intégrer la Chine au concert des nations commerçantes. Les auteurs, fervents partisans de la libéralisation du commerce international, multiplient en effet à l'envie les superlatifs pour se féliciter de cet événement historique.
Les auteurs reconnaissent néanmoins l'amplitude des problèmes auxquels le pays sera confronté  les insuffisances du secteur financier et du système juridique ou encore la question de la dégradation de l'environnement  et ne nient pas l'existence de multiples incertitudes («China's Challenges : Accelerating Domestics Reforms », pp. 139-180). Mais cette approche plus nuancée semble vite laisser place aux estimations prospectives les plus optimistes sur les conséquences macro-économiques de cette accession pour la «grande Chine», accession qui se fait aux dépens des autres économies asiatiques (pp. 101 et suivantes).
L'enthousiasme semble parfois aveugler les auteurs. Ils reprennent ainsi plusieurs fois à leur compte le discours nationaliste des autorités chinoises en estimant, par exemple, que l'accession de la Chine couplée à l'organisation des olympiades de 2008 sont comme une revanche sur les humiliations subies au XIXe siècle (p. 7). De même, ils jettent un regard rétrospectif exclusivement négatif sur la présence occidentale en Chine au début du XXe siècle. Quant aux vingt dernières années de réforme, elles sont présentées très succinctement comme le résultat de décisions « simples » prises par un Etat « fort, efficace, et pragmatique » (p. 23).
Plus critique est le chapitre dans lequel les auteurs reviennent sur les difficiles négociations bilatérales entre la Chine et les Etats-Unis (un résumé de l'accord figure en annexe). Ces difficultés sont très largement imputées aux incohérences de l'administration Clinton.
Mais c'est dans l'ultime chapitre, «Making Globalization and the WTO Work for all», que l'intention de l'ouvrage se révèle. Les auteurs y soulignent en effet combien l'enjeu de l'accession de la Chine à l'OMC avait trait, non seulement à l'avenir de la Chine, de l'Asie  et donc dans une certaine mesure de la croissance économique mondiale  , mais aussi à l'avenir de l'organisation elle-même. Ce thème souvent abordé par la presse internationale soulève en effet des questions stratégiques et géo-économiques intéressantes auxquelles on peut cependant difficilement répondre. La Chine prendra-t-elle la défense des pays en voie de développement en rétablissant un certain équilibre au sein d'une organisation internationale qui passe aux yeux des opposants à la mondialisation pour un club de pays riches dirigé par les Etats-Unis et les intérêts des grandes puissances ? Rien n'est moins sûr. Pékin ne s'est, d'une part, jamais montré très offensif si l'on en croit son attitude générale au sein des organisations internationales à vocations générales ou techniques, et le réalisme politique pourrait, d'autre part, l'emporter pour une puissance qui cherche à peser dans le commerce international et sur la scène diplomatique.
En somme, cet ouvrage qui aurait gagné à intégrer les données dont on dispose depuis le 11 décembre, en paraissant un peu plus tard, semble davantage témoigner des rapports de force entre pro et anti-mondialisation que fournir une analyse argumentée des conséquences pour la Chine de son accession à l'OMC.
 
         
        