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La Chine en Amérique latine

La Chine en Amérique latine.

Stratégies, objectifs et limites d’une présence

 

François Lafargue

 

Pendant un demi-siècle la République populaire de Chine n’a porté qu’un intérêt limité à l’Amérique latine, une région où les Etats-Unis exerçaient une véritable hégémonie politique et économique. Cette époque d’indifférence est révolue. Depuis cinq ans, la Chine multiplie les investissements du Rio Grande à la Terre de feu et figure désormais parmi les premiers partenaires commerciaux du Brésil, de l’Argentine et du Chili. Cette présence suscite toutefois inquiétudes et interrogations tant en Amérique latine qu’aux Etats-Unis peu enthousiastes à l’idée de voir Pékin s’immiscer dans cette région. La Chine se heurte aussi aux ambitions de l’Inde, également préoccupée par son approvisionnement en matières premières.

 

Pendant un demi-siècle, la République populaire de Chine (RPC) n’a porté qu’un intérêt limité à l’Amérique latine[1]. Les Etats-Unis exerçaient une véritable hégémonie politique et économique dans cette région où ils demeurent toujours influents[2]. Si Cuba a établi des relations diplomatiques avec la Chine dès 1960, la plupart des gouvernements d’Amérique latine ont attendu la visite de Richard Nixon à Pékin en février 1972 pour reconnaître la République populaire : l’Argentine et le Mexique en 1972, le Brésil deux ans plus tard et, plus tardivement encore, la Bolivie en 1985. Cette époque de relative indifférence est révolue. La visite de Hu Jintao à la fin de l’année 2004 au Brésil, en Argentine, au Chili et à Cuba, puis un an plus tard, au Mexique a été le signe de l’intérêt que porte Pékin à cette région[3]. Si la politique de la Chine en Afrique fait l’objet de nombreuses études, son rôle en Amérique latine est plus rarement évoqué. Pourtant, cette présence a des conséquences économiques et géostratégiques de premier ordre et suscite des inquiétudes et des interrogations tant en Amérique latine qu’aux Etats-Unis, peu enthousiastes à l’idée de voir Pékin s’immiscer dans cette région. Très régulièrement la presse comme les milieux politiques américains s’alarment de cette présence chinoise dans « l’arrière-cour » des Etats-Unis[4]. L’année 2006 a renforcé les craintes de Washington avec les victoires électorales de Michelle Bachelet au Chili, d’Alan Garcia au Pérou puis de Lula da Silva au Brésil qui, tous trois, ne cachent pas leur ambition de nouer des relations étroites avec Pékin.

La Chine en Amérique latine : Une influence croissante

L’influence de la Chine en Amérique latine peut être appréciée de deux manières.

Un premier constat objectif s’impose, la présence de la Chine reste pour le moment limitée. En 2005, l’Amérique latine ne représente que 3,55 % du commerce de la RPC, un chiffre encore modeste[5]. Selon les données du gouvernement chinois, en 2004 moins de 18 % du stock des investissements directs à l’étranger (IDE) de la RPC, soit 8,2 milliards de dollars[6], sont placés en Amérique latine. Et pour cette même année 2004, la Chine n’a apporté que 6 % du flux entrant d’IDE[7]. Mais ces données sont à prendre avec prudence car, à la lecture des statistiques précises du Ministère du commerce, il apparaît que les investissements dans cette région se concentrent pour l’essentiel aux îles Caïmans et aux îles Vierges, deux paradis fiscaux notoires. Et selon toute vraisemblance, ces capitaux repartent vers la Chine continentale pour être réinvestis en bénéficiant des avantages accordés aux étrangers. En retranchant ces investissements aux îles Caïmans et aux îles Vierges, l’Amérique latine ne reçoit plus que 1,5 % des IDE cumulés de la Chine à l’étranger. La CNUCED[8] indique d’ailleurs un chiffre comparable : 653 millions de dollars d’investissements cumulés en 2002 soit 1,5 % du stock des investissements de la Chine à l’étranger.

Mais ces données ne traduisent pas l’essor des relations financières entre Pékin et l’Amérique latine. Pour l’année 2005, les investissements de la Chine à l’étranger se sont établis à 6,9 milliards de dollars, portant le chiffre de ses investissements cumulés dans le monde à 50 milliards de dollars. Et depuis 2003, la Chine a signé des projets d’investissements publics et privés en Amérique latine, détaillés ci-après, pour un montant total de près de 10 milliards de dollars. En novembre 2004 à Brasilia, le Président Hu Jintao s’adressa aux membres du Congrès leur promettant que la Chine investirait la somme de 100 milliards de dollars dans la région dans les dix années à venir. Cette intention se concrétise progressivement.

En parallèle, le commerce bilatéral connaît une croissance exponentielle en passant de 12,6 milliards de dollars en 2001 à 40 milliards en 2004, pour s’établir à plus de 50 milliards l’an dernier (voir tableau 1). Avant 2010, le chiffre de 100 milliards de dollars devrait être atteint. Les principaux partenaires commerciaux de la Chine sont le Brésil, le Mexique et le Chili, qui à eux trois représentent 62,2 % des échanges[9] en 2004 (graphique 1 et 2). Les tableaux 1 et 2 présentent les données fournies par le Ministère du commerce de la RPC et qui servent de référence aux institutions internationales. Mais la plupart des pays d’Amérique latine récusent ces chiffres affirmant que les exportations de la Chine sont minorées. Et l’écart peut être important. La raison de cette sous-évaluation est simple. Une forte proportion (12 %) des exportations chinoises vers la région a comme destinataire officiel Panama. Un fait surprenant pour un pays de taille si modeste (trois millions d’habitants) et qui n’entretient pas de relations diplomatiques avec Pékin. Panama a en fait sur le continent américain un rôle comparable à celui de Hong Kong en Asie (zone d’assemblage de produits manufacturés et de conditionnement des marchandises…) et n’est en réalité qu’un point de transit. (Tableau 1 : Le commerce entre l’Amérique latine et la Chine)

Autre élément à souligner, le Mercosur — le marché commun du cône sud (qui associe l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela) — permet une circulation de la marchandise chinoise loin de son destinataire initial[10]. L’intérêt que la Chine porte à l’Amérique latine peut s’expliquer au regard de trois enjeux : pétrolier, minier et agricole.

Un enjeu pétrolier

En 2002, la Chine est devenue le deuxième consommateur mondial de pétrole, après les Etats-Unis mais devant le Japon. Et entre 2000 et 2005, Pékin est passé du neuvième au troisième rang parmi les importateurs mondiaux de pétrole. Ces achats à l’étranger, qui représentaient près du tiers de la consommation de pétrole en 2000 puis 50 % aujourd’hui, devraient atteindre 60 % d’ici 2010. La Chine s’est donc engagée dans une politique de diversification de son approvisionnement en hydrocarbures, investissant en Afrique (particulièrement au Soudan et en Angola), en Asie centrale et en Amérique latine.(Tableau 2 : Le poids de la Chine dans le commerce des pays latino-américains en 2004)

L’Amérique latine avec 9,7 % des réserves mondiales de pétrole assure en 2005, 8,8 % de la production mondiale[11]. Pour le moment la présence de la Chine dans le secteur des hydrocarbures reste modeste. La Chine est certes le troisième acheteur de pétrole d’Amérique latine, mais encore très loin derrière les Etats-Unis[12]. En 2005 cette région a fourni 3,1 % de l’approvisionnement pétrolier de la Chine, soit 107 000 barils par jour (b/j). Ce chiffre peut paraître faible, mais ces exportations ont augmenté de 28 % par rapport à l’année précédente (83 000 b/j) et de près de 20 fois par rapport à 2001. Une indéniable « montée en puissance » se produit puisque la part de l’Amérique latine dans les importations pétrolières de la Chine devrait doubler dès 2006.

La Chine a surtout noué des relations étroites avec le Venezuela, un acteur pétrolier de premier plan. Le Venezuela dispose de 6,6 % des réserves mondiales de pétrole (sixième rang) et 68 % des réserves de l’Amérique latine (contre 11,3 % pour le Mexique) et assure aujourd’hui 4 % de la production mondiale (septième rang).

En décembre 2004, comme plus récemment en août 2006, le président Chavez en visite officielle à Pékin a conclu avec Hu Jintao plusieurs accords de coopération économique et commerciale. Le commerce bilatéral entre les deux pays est passé de 150 millions de dollars en 2003 à 1,2 milliard en 2004 pour atteindre 2,14 milliards en 2005. La visite à Caracas en janvier 2005 du vice-Président, Zeng Qinghong témoigne de l’intérêt de Pékin pour le Venezuela. A cette occasion, plusieurs nouveaux contrats furent signés. La Chine prévoit d’investir 350 millions de dollars dans la mise en valeur de 15 champs pétrolifères (qui pourraient receler un milliard de barils de pétrole) et 60 millions de dollars pour la construction d’infrastructures (réseau ferroviaire, raffineries…). Des contrats de prospection de gaz off shore ont également été signés entre la SINOPEC et PDVSA ( Petróleos de Venezuela). Puis, à la fin du mois d’août 2005, la Chine et le Venezuela ont fondé une société commune afin de mettre en valeur le gisement de Zumano dans l’Etat d’Anzoategui qui offre une production de 50 000 b/j. La Chine a également ouvert à ce fournisseur une ligne de crédit de 40 millions de dollars destinés à faire l’acquisition de matériel agricole.

Le volume des exportations de pétrole du Venezuela vers la Chine est passé de 12 300 b/j en 2004 à 70 000 b/j l’année suivante. Puis, en 2006 il atteint 160 000 b/j[13], un chiffre qui devrait être doublé dans le courant de l’année prochaine, pour atteindre probablement 500 000 b/j en 2010. Le Venezuela représente à l’heure actuelle, au second semestre 2006, de l’ordre de 5 % des importations pétrolières de Pékin. La Chine est son deuxième client, après les Etats-Unis, lui achetant de l’ordre de 15 % de ses exportations pétrolières.

Toutefois, le volume des exportations d’hydrocarbures reste pour le moment limité en raison cause de la trop faible largeur du canal de Panama[14] qui interdit le passage de navires de fort gabarit. L’autre route maritime, le trajet par la route du Cap, en longeant les côtes de l’Afrique du Sud, reste deux fois plus longue (près de 45 jours) que la traversée du Pacifique. En mai 2006, Pékin et Caracas ont conclu un contrat d’un montant d’1,3 milliard de dollars prévoyant la livraison par Pékin de 18 navires pétroliers et une aide technique afin de construire des tankers au Venezuela.

Autre obstacle à relever, les gisements du Venezuela offrent un pétrole lourd à haut degré en soufre et les raffineries de la Chine ne sont pas correctement équipées pour le traiter. Si le Venezuela fait figure de pièce maîtresse de la stratégie pétrolière de la Chine, celle-ci ne néglige pas pour autant les producteurs plus modestes comme l’Equateur et le Pérou.

L’Equateur occupe le troisième rang pour les réserves en pétrole d’Amérique du Sud, après le Venezuela et le Brésil. Il assure 11,5 % des exportations pétrolières de l’Amérique du Sud après le Venezuela (74,2 %), et son potentiel est significatif. L’Equateur a également l’avantage de disposer d’un littoral sur la côte Pacifique, facilitant le commerce avec l’Asie. En août 2003, en Equateur, la China n ational p etroleum c orporation (CNPC)[15] s’est vue accorder un droit de prospection par le président Lucio Gutierrez. Quelques mois plus tard, la China national chemical (SINOCHEM) a fait l’acquisition, pour la somme de 100 millions de dollars, auprès de Conoco-Philipps, de 14 % des parts du gisement dénommé « bloc 16 » d’une superficie de 2 200 km 2 dans la province de l’Orellana. Ce gisement qui offre à la SINOCHEM 8 000 b/j est principalement exploité par la société espagnole Repsol-YPF (55 %) et la société taiwanaise, Chinese petroleum corporation (CPC) (31 %).

Enfin, plus récemment, en septembre 2005 le consortium Andes Petroleum mené par la CNPC a racheté les intérêts de la société canadienne EnCana pour 1,4 milliard de dollars. Pour l’année 2005, ce rachat a constitué la troisième plus importante opération financière en Amérique latine. Par cette acquisition, la Chine pourra disposer d’une production pétrolière de 75 000 b/j (grâce notamment aux gisements de Tarapoa et de Shiripuno) et d’une réserve estimée à environ 143 millions de barils. Au Pérou, la CNPC avait obtenu, dès 1993, un permis de forage dans les blocs 6 (155 km 2) et 7 (184 km 2) du gisement de Talara, dont les réserves sont évaluées à 22 millions de barils.

Au Brésil, les investissements sont plus limités, la SINOPEC et PETROBRAS se sont engagés à multiplier les partenariats à l’étranger comme en Iran. En Argentine, lors de sa visite en 2004, Hu Jintao avait promis d’investir 20 milliards de dollars en dix ans dont le quart dans l’industrie pétrolière. Energia Argentina et une société sino-angolaise (la China sonangol international) mènent des prospections au large de l’Argentine.

En 2004, la CNPC a racheté la filiale de PlusPetrol au Pérou, PlusPetrol Norte[16], pour un montant de 200 millions de dollars. Puis à Cuba en mars 2005, la SINOPEC a conclu un accord avec Cubapetroleo (CUPET) afin de mettre en valeur le gisement de Pinar del Rio sur la côte occidentale de l’île. De même le Mexique, pourtant membre de l’ALENA, n’échappe pas à la convoitise de la Chine. Les visites du Premier ministre Wen Jiabao en décembre 2003, comme de Hu Jintao en septembre 2005, se sont conclues par la signature de contrats pétroliers. Pour le moment, le Mexique n’exporte pas d’hydrocarbures à destination de la Chine, mais la CNPC a obtenu des permis de recherches.

En Bolivie, la présence de Pékin demeure modeste, mais ce pays avec ses réserves significatives de gaz[17] pourrait également devenir à terme un fournisseur important. L’élection en décembre dernier d’Evo Morales, très critique envers les Etats-Unis, semble favoriser un rapprochement avec la Chine. En janvier 2006, celui-ci a entrepris un périple d’une dizaine de jours à l’étranger notamment à Cuba, au Venezuela, en Espagne, en France, en Chine, en Afrique du Sud puis au Brésil. A Pékin lors de son séjour, il a rencontré Hu Jintao et a incité la Chine à venir investir en Bolivie. Surtout la décision en mai dernier de nationaliser les actifs des sociétés d’hydrocarbures étrangères (comme Repsol, Total mais aussi le Brésilien Petrobras) va priver le pays d’investissements dans ce secteur et l’obliger à trouver de nouveaux partenaires car ces entreprises doivent accepter de signer de nouveaux contrats beaucoup moins généreux ou bien sont contraintes de quitter le pays (Graphique 1 : Les cinq premiers clients de la Chine en Amérique latine en 2004 et Graphique 2 : Les cinq premiers fournisseurs de la Chine en 2004) .

Un intérêt minier

Pour Pékin, l’Amérique latine avec 45 % des réserves mondiales de cuivre, le quart des réserves mondiales d’argent, et le tiers de celles d’étain est un véritable réservoir de matières premières. Le Chili et le Pérou assurent 44 % de la production mondiale de cuivre et la moitié des importations de la Chine, le premier consommateur mondial. En toute logique les investissements dans le secteur minier se multiplient. Au Pérou, le groupe Shougang via sa filiale Shougang Hierro exploite plusieurs mines de fer depuis 1992 comme à Marcona au sud de Lima.

Au Chili, en juin 2005 la société chinoise, China Minmetals corporation (Minmetals) s’est associée avec Codelco (Corporacion nacional del cobre)[18], et a obtenu la livraison annuelle de 55 000 tonnes de cuivre pendant 15 ans. La Chine pourrait également participer à la mise en valeur de la mine de cuivre de Gaby dont la production annuelle attendue à partir de 2008 sera de 150 000 tonnes.

Avec Cuba, dont la Chine est maintenant, après l’Espagne et le Venezuela, le troisième partenaire commercial, les relations s’amplifient. L’île est le troisième producteur mondial de nickel[19] et détient d’importantes réserves de cuivre et de cobalt. En novembre 2004, à l’occasion de la visite de Hu Jintao à La Havane, Minmetals et Cubaniquel ont décidé de mettre en valeur le gisement de nickel de Las Camariocas dans la province de Holguin, situé à 800 km à l'est de La Havane (dont la production est de 22 500 tonnes par an). Cette association devrait permettre de faire passer la production annuelle de cuivre cubain, actuellement de 75 000 tonnes, à près de 132 000 tonnes. Un autre accord a été signé entre China international trust et investment corp (CITIC) et Cubaniquel pour développer le gisement de nickel de San Felipe dans la province de Camaguey. Les investissements chinois sont appelés à connaître encore une forte croissance dans les années à venir. Le 9 septembre 2005, s’est tenu à Xiamen un colloque sur les opportunités d’investissements de la Chine à Cuba. Et la délégation de l’île a proposé 12 projets dont la construction de sucreries et d’infrastructures touristiques.

Le Brésil est aussi l’une des principales destinations des investissements chinois. Après l’Inde et l’Australie, le Brésil est le troisième fournisseur en fer de la Chine, assurant le quart des importations totales. La Chine, quinzième partenaire commercial du Brésil en 2000, est cinq ans plus tard, son troisième client. En octobre 2001, la société brésilienne Companhia Vale do Rio Doce (CVRD), premier producteur et exportateur mondial de minerai de fer, s’est engagée à livrer six millions de tonnes de fer par an au sidérurgiste Baosteel, premier producteur d’acier en Chine, un volume qui passera à partir de 2010, à 20 millions de tonnes. Au printemps 2004, Baosteel en association avec CVRD et Arcelor a décidé de construire au Brésil, près du port de Sao Luis dans l’Etat de Maranhao, un complexe sidérurgique destiné à produire, à partir de 2007, 3,7 millions de tonnes de plaques d’acier par an. L’usine ne se trouve qu’à une journée par chemin de fer du gisement de Carajas et à quelques jours en bateau de Panama. L’investissement total s’élève à 2,5 milliards de dollars dont 60 % financé par Baosteel. CVRD a également conclu des accords de livraison de minerai de fer avec Shougang. L’Amérique latine est aussi devenue un véritable grenier agricole pour la Chine.

Un intérêt agricole

En Chine, l’industrialisation comme la faiblesse de l’irrigation dans certaines régions provoquent une diminution des terres arables, réduisant progressivement la production nationale. Ainsi, les récoltes de soja, 17 millions de tonnes en 2005, sont au même niveau que dix ans plus tôt. La Chine est à ce jour le premier consommateur et le premier importateur mondial de soja (38 % des importations mondiales). La moitié de la consommation de soja est importée principalement des Etats-Unis, du Brésil et de l’Argentine, les trois premiers exportateurs mondiaux[20]. L’Argentine assure à elle seule le tiers des importations en soja de la Chine. De 1999 à 2004, les importations chinoises de soja du Brésil et de l’Argentine ont été, en valeur, multipliée par dix. L’augmentation du niveau de vie entraîne également une hausse de la consommation de viande (qui par personne a été multipliée par deux depuis 1990), viande achetée notamment au Brésil et en Argentine. Ces deux pays assurent 20 % des importations de viandes de Pékin.

Interrogations sur la présence chinoise

La présence de la Chine bouleverse les équilibres économique et géostratégique régionaux. Ces investissements massifs suscitent un réel débat[21] au sein des pays d’Amérique latine qui redoutent de se voir réduits à un rôle de fournisseur de matières premières agricoles et minières. Les chiffres sont éloquents, les exportations de l’Argentine à destination de la Chine sont aux trois quarts constituées de produits agricoles. La Chine est, avec 45 % des achats, le principal client de graines de soja, suivie par la Thaïlande (13 %) puis l’Espagne (7 %). Les exportations du Brésil vers la Chine sont également, à hauteur de 37 %, constituées de produits agricoles. La dépendance des pays d’Amérique latine est incontestable, la Chine est la destination de 70 % du fer, de 47 % du plomb et de 37 % du cuivre exportés par le Pérou, de 33 % de l’étain exporté par la Bolivie, et de 16 % du cuivre partant du Chili. Loin de permettre le développement, le commerce avec la Chine fragilise sur le long terme les économies d’Amérique latine. La Chine conforte ces pays dans leur attitude de rentier. L’appréciation du cours des matières premières[22] et les taux de croissance au Chili (5,9 % en 2004, puis 5,1 % en 2005) ou en Argentine (9,2 % en 2005) n’incitent guère à la diversification de la production.

L’ouverture commerciale est source de nombreuses déconvenues. Les importations chinoises inondent les marchés locaux, une situation qui pourrait s’aggraver avec la mise en place d’une zone de libre-échange bilatérale . La concurrence parfois déloyale des produits chinois est également dénoncée. Plusieurs gouvernements comme celui du Brésil et celui d’Argentine[23] n’ont pas hésité l’an passé à recourir à des mesures anti-dumping concernant le textile et le jouet. Le déficit commercial de Pékin avec l’Amérique latine se résorbe assez rapidement. L’excédent commercial du Brésil avec la Chine s’est considérablement réduit passant de cinq milliards de dollars en 2004 à 1,48 milliard l’année suivante. De surcroît, les pays d’Amérique latine doivent subir la concurrence de la Chine sur les marchés étrangers principalement les Etats-Unis. Entre 2003 et 2005, avec la fin des Accords multifibres (AMF), la part de la Chine dans les importations de textile des Etats-Unis a doublé passant de 25 % à 56 %.

Autre fait à souligner, les récriminations envers les investisseurs chinois et leur méthode de management se multiplient. Dans l’usine brésilienne du chinois Gree Electric Appliances installée à Manaus, les ouvriers se plaignent des cadences de production et du non-respect des lois sociales. Un exemple loin d’être isolé.

Pour autant, une étude de la Banque de développement interaméricaine[24] se veut rassurante estimant que les économies latino-américaines ne souffrent pas d’une concurrence directe de l’Asie. Bien au contraire, la Chine apparaît comme un marché potentiel principalement pour le Brésil. La Chine accueille d’ailleurs le tiers des investissements étrangers du Brésil avec notamment les fabricants d’équipements électro-ménagers, Brasmotor et Embraco Snowflake et les constructeurs automobiles Sabó et MarcoPolo. Embraer a aussi constitué une joint-venture avec China Aviation Industry Corporation, afin de produire, à Harbin, l’avion de transport régional RJ 145.

Ainsi, il serait excessif de ne voir dans ces investissements qu’un simple comportement de prédateur économique, une idée souvent défendue par les Etats-Unis. Signe de ce rapprochement bilatéral, en novembre 2004, le Brésil, l'Argentine, le Pérou et le Chili ont accordé à la Chine le statut d'économie de marché que lui refusent toujours les Etats-Unis et l’Union européenne. Pékin sollicite une telle reconnaissance auprès de ses principaux partenaires commerciaux afin de pouvoir se défendre contre de possibles procédures anti-dumping intentées par les gouvernements[25].

La méfiance de Washington

Aux Etats-Unis la plupart des rapports et des analyses consacrés à la présence de la Chine en Amérique latine partagent la même conclusion. Pékin est une réelle menace[26], à trois titres, politique, diplomatique et militaire.

Une Amérique latine sans les Etats-Unis ?

En quelques années, après Hugo Chavez au Venezuela (1998) et Lula Da Silva au Brésil (2002), la plupart des pays d’Amérique latine ont élu un gouvernement de gauche populiste, aux positions souvent hostiles à la politique américaine, comme Nestor Kirchner en Argentine (2003), Tabaré Vazquez en Uruguay (2004), puis l’année passée Evo Morales en Bolivie et Michelle Bachelet au Chili. Surtout, la victoire de Daniel Ortega au Nicaragua en novembre 2006 inquiète les Etats-Unis qui redoutent de voir se réduire leur emprise sur le continent latino-américain. Une crainte d’autant plus fondée que, depuis le 11septembre, les Etats-Unis ne portent plus guère d’attention à l’Amérique latine. Sur le plan politique, la présence de la Chine érode l’influence de Washington dont l’isolement est patent. Seuls le Nicaragua, le Honduras, la République dominicaine et le Salvador[27] ont participé à la coalition formée par les Etats-Unis pour combattre en Irak. Les pays latino-américains ne craignent plus de se heurter à Washington et voient dans la Chine un interlocuteur plus conciliant que le FMI. La décision de nationaliser le secteur des hydrocarbures en Bolivie comme en Equateur en est une illustration. La Chine prendra la relève des investissements américains et européens.

Sur le plan pétrolier, l’Amérique latine représente plus du quart des importations américaines[28] et la politique d’Hugo Chavez a déjà contraint les Etats-Unis à réduire leurs achats au Venezuela. Les relations entre Washington et Caracas ne cessent de se détériorer. Hugo Chavez entend fonder un front commun contre « l’impérialisme » nord-américain. Cette rhétorique se traduit par un rapprochement avec les gouvernements stigmatisés par Washington comme le Belarus ou l’Iran.

La Chine, un investisseur de premier plan, peut permettre au Venezuela de se dégager de l’emprise des Etats-Unis[29]. Mais Hugo Chavez n’entend pas se cantonner à n’être qu’un fournisseur en hydrocarbures et entend jouer un rôle politique international. En octobre 2006, le Venezuela a brigué, avec le soutien de Pékin, un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. En vain, puisqu’après une bataille diplomatique acharnée avec le Guatemala soutenu par Washington, c’est l’Etat de Panama qui a été élu.

Et après l’Espagne (qui devrait livrer des avions de transport et des corvettes), la Russie (qui a vendu des Sukhoï), la Chine sera probablement sollicitée pour livrer des armes à Caracas. Les liens noués avec Pékin ont ainsi conforté l’assurance de Chavez, héraut de « l’Alternative bolivarienne pour les Amériques », un projet destiné à renforcer l’intégration des économies de la région. En juin 2005, le Venezuela a conclu une alliance dénommée Petrocaribe[30], avec 13 pays de la Caraïbe. L’initiative Petrocaribe permet de soutenir les municipalités socialistes au Salvador et au Nicaragua[30] et de contribuer à la popularité des mouvements de gauche. De même, Cuba parvient à assurer son indépendance pétrolière grâce à sa propre production (qui couvre la moitié des besoins de l’île) et par les livraisons effectuées par le Venezuela. Les deux autres puissances de la région, le Mexique et le Brésil, font l’objet d’une réelle sollicitude de la part de Pékin.

En 2001, la société de textile Sinatex, filiale du groupe China Worldbest Group Co s’est implantée au Mexique à Obregon. Il s’agit de l’investissement chinois le plus important à ce jour dans le pays. Le commerce bilatéral encore limité s'accroît vite. En 2004 le volume des échanges commerciaux s'est élevé à 7,112 milliards de dollars, en hausse de 44 % par rapport à l’année antérieure. La proximité politique entre Mexico et Washington, comme l’interdiction faite aux entreprises étrangères d’investir dans le secteur pétrolier, décourage au moins pour le moment les projets communs.

Avec le Brésil, la Chine a noué un véritable partenariat dans le domaine spatial depuis 1986. Les deux pays ont élaboré le programme CBERS (China-Brazil earth resources satellite). Le couronnement de ce travail commun a été le lancement en octobre 1999 du satellite CBERS (dénommé en Chine, Zong guo Zi Yuan) destiné à recueillir des informations météorologiques. En octobre 2003, la Chine a procédé au lancement d’un second satellite Zi-Yuan-2 dont les caractéristiques techniques n’ont pas été divulguées. Deux nouveaux satellites, CBERS-3 et 4, devraient être lancés en 2008 puis 2010. Cette coopération sino-brésilienne s’étend au domaine énergétique puisque le Brésil envisage aujourd’hui d’exporter vers la Chine de l’uranium destiné au fonctionnement de ses centrales nucléaires.

Enfin, la présence de Pékin compromet grandement le projet d’une zone de libre-échange américaine (ZLEA) à l’échelle du continent promue par le président Bush. En novembre 2006, lors du sommet de Mar de la Plata en Argentine, aucun accord entre les 34 participants n’a pu être conclu. Les gouvernements latino-américains ont estimé trop faibles les concessions de Washington. Pour sa part, Pékin propose la signature d’accords commerciaux préférentiels. En novembre 2005, la Chine et le Chili ont signé un premier traité de libre-échange bilatéral, destiné ensuite à s’élargir aux autres pays de la région. Déjà 92 % des exportations du Chili vers la Chine sont exonérés de droits de douane.

Des enjeux diplomatiques

La « montée pacifique » de la Chine en Amérique latine peut inciter certains gouvernements à rompre avec Taiwan, accentuant davantage l’isolement de l’île. Parmi les 25 Etats entretenant des relations diplomatiques avec Taiwan, près de la moitié se trouve en Amérique latine et dans les Caraïbes, leBelize, le Costa Rica, le Guatemala, Haïti, le Honduras, le Nicaragua, le Panama, le Paraguay, la République dominicaine, Saint-Kitts et Nevis, Saint-Vincent-et-les Grenadines, et le Salvador. De profondes évolutions devraient avoir lieu dans les prochaines années. Les milieux d’affaires dans ces pays souhaitent accéder au marché chinois et appellent à une rupture des relations avec Taipeh. L’île nationaliste pourrait perdre l’un de ses principaux soutiens après la victoire, en novembre 2006, de Daniel Ortega au Nicaragua. Les Etats-Unis redoutent également l’influence militaire grandissante de Pékin.

Un rôle militaire contestable

Pour le moment, force est d’admettre que la coopération militaire reste limitée[32] mais tout indique que Pékin ne refusera pas les sollicitations des pays de la région. Avec le Pérou, la Bolivie est l’un des rares pays d’Amérique latine client de l’industrie militaire chinoise. La coopération militaire entre La Paz et Pékin a commencé dès les années 1980. La Chine a livré, en 1993 au gouvernement bolivien, 28 missiles sol-air (SAM) en vertu d’un accord de coopération bilatérale. Pressentant la victoire d’Evo Morales en octobre 2005, des conseillers militaires américains parvinrent, avec la complicité de militaires boliviens, à acheminer les missiles sur la base de El Alto, près de La Paz, puis les ramenèrent aux Etats-Unis[33].

Cuba autorise la Chine à utiliser les infrastructures de télécommunication construites puis abandonnées par les Russes, notamment la base de Torrens, près de la Havane qui abrite des équipements sophistiqués. La base de Torrens a été construite en 1964 et a accueilli, jusqu’en 2001, plus de mille coopérants soviétiques. La Chine profite, pour renforcer son influence (qui se traduit par des échanges de missions militaires), de l’effacement relatif de Washington, effacement qui s’est accéléré depuis la fondation de la Cour pénale internationale (CPI) régie par le Statut de Rome.

Washington ne reconnaît pas la compétence de la Cour[34] et a adopté, en août 2002, la loi de protection des ressortissants américains (American Service Members Protection Act) qui prévoit dans sa section 2004 d’interdire toute coopération militaire avec les Etats reconnaissant le statut de la CPI. Or, à ce jour, à l’exception du Chili, du Salvador, du Guatemala et du Nicaragua, tous les gouvernements d’Amérique latine ont signé et ratifié le Statut de Rome. Les Etats-Unis ont alors exigé que leur soit conférés un privilège d’immunité[35] par le biais d’accords bilatéraux. Mais sans succès. Pour convaincre les plus réticents, l’amendement Nethercutt, voté en décembre 2004, prévoit de sanctionner financièrement les Etats signataires du Statut de Rome et qui refusent les accords d’immunité bilatéraux. Après la Colombie, la Bolivie a dû se résoudre en mai 2005 à accepter ces accords bilatéraux. Le Honduras et le Panama auraient, sous couvert de confidentialité, également signé un texte avec Washington. Dans sa déposition au Sénat, le général Bantz Craddock[36] déclare dangereuse la suspension de la coopération militaire avec la plupart des pays d’Amérique latine qui ont rejeté le principe de privilèges d’immunité. La formation des militaires de la région est un atout dont se privent les Etats-Unis.

Washington estime donc négative la présence de la Chine. L’essor du commerce bilatéral se traduit par une hausse inquiétante de la criminalité (contrebande de produits, contrefaçon..) et l’attitude de Pékin qui apporte son soutien à des partis politiques populistes et démagogiques aggrave la déstabilisation du continent américain.

Pourtant, il serait erroné de conclure que l’Amérique latine passe sous l’influence de Pékin qui est loin d’être un « deus ex machina ». Les changements électoraux en Amérique latine doivent davantage à une évolution des sociétés latino-américaines (crise financière en Argentine, rejet des multinationales, émancipation des minorités indiennes, parachèvement du processus de démocratisation…) qu’à une quelconque stratégie d’influence de la Chine. L’instabilité et les changements politiques fragilisent également les entreprises chinoises comme en Bolivie et encore plus récemment en Equateur.

En septembre 2004, deux sociétés chinoises, Lutianhua et Chenda Chemical, ont annoncé leur association avec le Bolivien Lisatum afin de construire une usine pétrochimique destinée à produire de l’ammoniaque. Trois mois plus tard, à la fin de l’année, une filiale de la SINOPEC, Sheng li international oil a signé plusieurs contrats avec YPFB[37] (la société nationale d’hydrocarbures bolivienne) prévoyant notamment la construction de deux raffineries, d’une centrale thermique près de Villamontes, et la mise en valeur de dix gisements d’hydrocarbures dans le Chaco et le Chapare. Cet accord avait pu être signé car la Chine acceptait d’être minoritaire avec 49 % du capital de l’entreprise commune. Un investissement colossal[38] d’un montant d’1,5 milliard de dollars, l’équivalent de 18 % du PNB de la Bolivie pour l’année 2004. Mais le flou juridique relatif aux investissements dans le secteur des hydrocarbures a incité Shengli à abandonner son projet.

En Equateur un imbroglio juridique implique également la Chine. En mai 2006, les contrats d’exploitation détenus par OXY ont été résiliés par le gouvernement. La société américaine est accusée d’avoir cédé illégalement, six ans plus tôt, 40 % du bloc 15 qu’elle détenait, au groupe canadien EnCana. Mais celui-ci a ensuite lui-même cédé cette participation au consortium chinois Andes petroleum qui se voit donc contester cette propriété.

Conclusion

La Chine en Amérique latine évolue dans un environnement moins familier qu’en Afrique[39]. La Chine a tissé des liens avec le continent noir dès les années 1950 et a contribué au combat pour l’émancipation de certains peuples. Avec l’Amérique latine, les souvenirs communs sont plus rares et l’amitié très récente. Le régime politique chinois suscite la méfiance dans une région qui a subi la tragédie des dictatures et où les institutions démocratiques sont encore fragiles. Les relations entre Pékin et l’Amérique latine ne sont pas des liens de sujétion. Le Brésil, dixième puissance économique mondiale (dont le PNB équivaut à deux fois celui de l’Afrique sub-saharienne) se voit davantage en partenaire de Pékin qu’en affidé.

Au-delà des discours louant l’amitié et la coopération, une méfiance se révèle en filigrane. Pékin a rejoint l’Organisation des Etats américains (OEA) en qualité de membre observateur permanent en mai 2004, mais sa candidature à la Banque interaméricaine de développement a été jusqu’à présent refusée à plusieurs reprises. Par crainte qu’au sein de cette instance, Pékin puisse peser encore davantage sur l’économie et la politique de cette région.

La Chine n’hésite pas à sacrifier cette amitié quand ses intérêts fondamentaux sont en jeu. Pékin s’est refusé à soutenir le Brésil, à l’origine, avec l’Allemagne, l’Inde et le Japon, de la proposition intitulée G 4, destinée à élargir le Conseil de sécurité de 15 à 25 membres, en créant six nouveaux sièges de membres permanents, dont deux pour les pays du continent africain et quatre sièges de membres non permanents. Au sein de l’OMC, la Chine ne s’est guère engagée aux côtés des pays d’Amérique latine dans leur combat contre les subventions agricoles versées par l’Union européenne et les Etats-Unis à leurs producteurs. Pékin n’est pas concerné par cette question et ne veut pas ajouter un grief supplémentaire dans ses relations commerciales, déjà tumultueuses, avec l’Occident. Pourtant, Pékin ne pourra plus entretenir longtemps cette attitude d’engagement prudent à cause de l’implication plus soutenue de l’Inde en Amérique latine. L’Inde, à la recherche de nouvelles sources de matières premières et d’un soutien politique pour accéder au Conseil de sécurité de l’ONU, s’intéresse aussi à l’Amérique latine.

L’Amérique latine ne représente aujourd’hui que 2,2 % du commerce de l’Inde[40]. Pourtant ces chiffres ne doivent pas masquer la réelle dynamique de croissance et une accélération des échanges depuis trois ans[41]. Ces échanges bilatéraux ont été amplifiés par la signature entre l’Inde et les membres du Mercosur[42] en janvier 2004, d’un accord commercial préférentiel concernant 450 produits, qui doit amener à terme à la création d’une zone de libre échange. Les investissements indiens dans cette région restent limités comme le souligne une note de la CNUCED[43]. En 2004, le stock des investissements directs à l’étranger de l’Inde s’élevait à 6,6 milliards de dollars, dont seulement, 2 % en Amérique latine. Mais depuis trois ans, la présence des entreprises indiennes en Amérique latine se renforce. L’Amérique latine va devenir prochainement un terrain d’affrontement entre les trois principales puissances du milieu du XXI e siècle : les Etats-Unis, la Chine et l’Inde.